S01 E03 Une expérience classique avec des aimants

Publié le jeu. 06 août 2020 dans PQT , modifié le:

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Maintenant que nous savons ce qu'est une expérience de pensée, nous allons en réaliser une avec des aimants classiques. Cette expérience «classique» nous permettra de comprendre quels résultats Stern et Gerlach auraient obtenu en 1922 si le monde microscopique, à l'échelle atomique, se comportait comme le monde auquel nous sommes habitués, à notre échelle.

En effet, ce n'est qu'après avoir bien compris comment la nature se comporte à notre échelle dans ce genre de situation que nous pourrons commencer à comprendre à quel point elle se comporte d'une manière radicalement différente à l'échelle atomique.

Présentation

Notre expérience de pensée

Notre expérience de pensée

Nous avons ici à gauche un appareil qui dans un instant va lancer des petits aimants sphériques. En fait d’aimants, dans la véritable expérience, il s’agira en réalité d’atomes d’argent dont les physiciens ont toutes les raisons de penser qu’ils vont se comporter comme des aimants. Mais pour le moment nous imaginerons qu'il s'agit de petits aimants ordinaires et sphériques, lancés par l'appareil situé à gauche de l'image.

Ces petits aimants vont survoler ce très gros aimant, que j’ai placé sur le sol de mon laboratoire virtuel. Tout l'enjeu de l'expérience est d'essayer de comprendre comment les petits aimants sphériques, qui représentent des atomes aimantés, vont se comporter en survolant le gros aimant. Premier aimant

Voici notre premier aimant

Premier aimant

Premier aimant

Comme tous les aimants, il a un pôle nord, colorié ici en rouge, et un pôle sud, colorié ici en bleu. Si j’ai mis le pôle nord en bas, c’est pour coller au plus près de l’expérience de Stern et Gerlach telle qu’elle est le plus souvent décrite, mais j’aurais pu faire le contraire sans que ça ne change le résultat final, comme on le verra dans un instant.

Que va-t-il se passer au moment où notre petit aimant va survoler le gros aimant fixe ?

C’est une expérience de pensée mais je suppose que comme moi, vous avez déjà suffisamment manipulé des aimants dans votre enfance pour le prévoir.

Les pôles opposés vont s'attirer et le petit aimant va avoir tendance à venir se coller sur le gros. Toutefois, s'il a été lancé assez vite, au lieu de venir se coller sur le gros aimant placé au sol de notre laboratoire, il va seulement être dévié dans sa course, vers le bas, et il finira son voyage sur l'écran que j'ai mis au fond de mon labo, du côté de la cible rouge.

Deuxième aimant

Deuxième aimant

Deuxième aimant

Si l'aimant est positionné dans le sens inverse, évidemment, les pôles qui se font face seront de même nature. Comme nous l'avons tous expérimenté dans notre enfance, ils vont donc se repousser et notre deuxième aimant finira sa course du côté de la cible bleue.

Dans n'importe quelle autre position

Dans n'importe quelle autre position

Dans n'importe quelle autre position

Il n'y a bien sûr aucune raison que nos petits aimants sphériques soient toujours bien alignés verticalement. Ils peuvent se trouver dans n'importe quelle autre position, comme les deux de cette image, et c'est d'ailleurs là que va commencer à se jouer tout le mystère de l'expérience de Stern et Gerlach comme nous le verrons bientôt.

Positions intermédiaires

Positions intermédiaires

Encore une fois, nous avons tous observé dans notre jeunesse comment se comportent des aimants dans ce genre de situation. Si on ne les maintient pas fermement, ils vont basculer sur eux-mêmes puis venir se coller l'un à l'autre.

Mais souvenons-nous que nos aimants se déplacent assez vite au dessus des gros aimants. Ils n'auront donc pas le temps de faire complètement ce mouvement.

Au lieu de cela, on peut donc raisonnablement imaginer que les aimants dans des positions intermédiaires basculeraient un peu mais surtout seraient moins déviés verticalement que ceux qui étaient soit complètement poussés vers le haut soit complètement attirés vers le bas.

En tout logique, nous devrions donc les retrouver à des positions intermédiaires sur la cible.

Et si nous avons déjà quelques connaissances un peu solides un physique, nous pouvons même calculer ces positions intermédiaires [1].

Résumons-nous

  • Les petits aimants sphériques qui sont alignés avec le gros aimant seront attirés par lui et déviés fortement vers la bas.
  • Ceux qui sont exactement alignés dans la position inverse, seront repoussés et fortement déviés vers le haut.
  • Ceux qui sont dans des positions intermédiaires subiront des déviations intermédiaires.

Vous l'avez compris, si on passe autant de temps à approfondir tout çà, c'est parce que, justement, les atomes ne se comporteront pas comme ça. Ils se comporteront de manière quantique et c'est là tout l'objet de notre voyage. Mais chaque chose en son temps. Les grands aimants du laboratoire Schéma de l'expérience historique

Arrivés à ce stade, ceux qui ont déjà vu des dessins représentant l’expérience de Stern et Gerlach se demandent sans doute pourquoi je n’ai représenté qu’un seul gros aimant alors que dans les représentations habituelles il y en a toujours deux, qui ont d'ailleurs des formes bizarres ?

Afin de ne rien laisser dans l'ombre, nous consacrerons tout l'épisode 5 de cette saison à la forme de ces aimants, mais nous pouvons dès à présent donner l'idée générale: Pour que l'expérience fonctionne bien, il faut un champ magnétique beaucoup plus puissant que celui qu'on obtiendrait en ne faisant que survoler un aimant plat.

Mais essayons d'abord de comprendre pourquoi diable Stern et Gerlach pouvaient penser, en 1922, que des atomes d'argent se comporteraient peut être comme de minuscules aimants ?

Notes et références

[1]Elles sont fonction du cosinus de l'angle que fait le projectile avec la verticale. Mais comme nous avons promis de ne pas faire de maths dans les deux premières saisons, nous n'approfondirons cela que dans les saisons 03 et 04.

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