Public visé et motivations

Mécanique quantique

Physique quantique pour les francs-maçons, les amateurs et d’autres touristes

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Version précédente

La première version de cet ouvrage s’est intitulée « Physique quantique en touriste », vous la trouverez ici. Elle avait pour objectif de partager les carnets de route de mon plus récent voyage « en amateur » (un de mes profs disait « en touriste ») dans les territoires de la mécanique quantique.

Je n’ai pas terminé le tome deux. Pourquoi? Parce que j’ai perdu presque tout mon public en route! Et pourtant, ça avait l’air de commencer si bien!

Après un temps de réflexion sur les raisons de ce demi-échec, il est temps maintenant de reprendre l’ouvrage. C’est ce que je vais faire ici-même. Je reprendrai une partie des chapitres de l’édition précédente, mais elle sera complètement remaniée, en précisant le public visé, les objectifs et la méthode suivie.

Pour les francs-maçons

Pourquoi dédier cette deuxième édition plus spécialement aux francs-maçons?

Tout simplement parce la plus grosse partie des retours que j’ai reçus, ainsi que la plus grande partie des participants aux petits cours en ligne que j’ai organisé sur ces sujet étaient des Frères et des Sœurs Maçon(ne)s [1].

Pourquoi cela?

Évidemment, la composition de mon entourage habituel y est pour beaucoup mais à la réflexion, ce n’est pas la seule raison, ou en tout cas ce n’est pas une raison indépendante d’autres.

Mon premier objectif était de réaliser un cours de mécanique quantique de niveau « intermédaire ». En effet, en librairie et sur le Net, on trouve énormément de très bons ouvrages de vulgarisation « sans mathématiques ». On en trouve encore plus de très mauvais d’ailleurs. On trouve aussi, à condition de fréquenter les librairies proches des universités et d’avoir la chance de tomber sur un vendeur compétent, des cours absolument remarquables à destination des étudiants en physique.

Mais comment faire quand on veut comprendre cette « nouvelle physique » de manière un peu sérieuse, ce qui nécessite un minimum de mathématiques, sans pour autant y consacrer les années d’études nécessaires à la formation d’un ingénieur ou d’un chercheur?

Est-ce seulement possible? C’est en tout cas le défi que j’entends relever.

Mais surtout «A quoi bon?». Qui peut être assez fou pour se lancer dans une étude pareille, qui demande quand même pas mal de constance et d’efforts? Qui irait s’engager dans une étude aussi sérieuse sans en espérer un bénéfice professionnel?

Et bien… un certain nombre de francs-maçons justement. Oh pas tous, loin de là, mais un certain nombre d’entre eux.

Et pourquoi donc?

Cela tient sans doute à leur histoire. Beaucoup de francs-maçons se sentent héritiers des courants de recherche spirituelle de la Renaissance et des Lumières. Et il y a là de mon point de vue un lien intéressant à explorer. Nous y reviendrons plus en détails très bientôt, mais je voudrais déjà donner quelques pistes.

Beaucoup de francs-maçons disais-je, pas tous mais beaucoup, se sentent héritiers, dans leur démarche vers ce qu’ils appellent «la Lumière», de ceux de leurs prédécesseurs qui essayaient de se libérer des dogmes de leur époque et de mieux comprendre l’Univers dans lequel ils vivaient.

Exposer l’histoire et les évolutions des idées maçonniques nous entraînerait trop loin ici mais je voudrais mentionner rapidement quelques conceptions assez largement partagées dans ces milieux:

  • La Nature est soumise à des lois qui l’ordonne et qui régissent toutes les choses dans leur ensemble et chaque chose dans on détail. Ces lois ont quelque chose à voir avec ce que les grecs nommaient le «logos» et qu’on retrouvera par la suite dans le christianisme.
  • Ces lois qui organisent la Nature ont aussi quelque chose à voir avec les mathématiques en général et la géométrie en particulier. Leur compréhension nécessite des efforts et de la patience.
  • La compréhension de ces lois augmente peu à peu, chaque génération apportant sa contribution.
  • Il est intéressant de savoir si ces lois sont exactement les mêmes selon qu’on observe la nature à petite échelle (ce que les anciens appelaient le microcosme) ou à très grande échelle (le macrocosme).
  • Il est important d’essayer de se forger sa propre opinion sur de nombreux sujets tout en restant conscient du fait qu’on ne peut pas maîtriser parfaitement tous les sujets. Les efforts ne sont pas toujours récompensés, il faut pourtant les fournir et ne pas renoncer à l’avance.
  • On n’apprend pas bien et on ne comprend pas bien tout seul. Et on comprend rarement tout du premier coup.
  • Il est important de comprendre au moins un peu les lois qui gouvernent notre Univers si nous espérons y trouvez notre place.
  • Il est tout aussi important, et tout aussi difficile, de combattre en soi-même comme à l’extérieur de soi l’ignorance et la superstition.

Je vais m’arrêter là pour le moment car j’imagine que ceux de mes lecteurs qui sont un peu familiarisés avec la franc-maçonnerie auront déjà compris pourquoi je pense que la «physique moderne» – précisément parce qu’elle s’est lancée à la recherche des lois fondamentales qui régissent le comportement de la matière et de la lumière – est susceptible de les intéresser.

Je voudrais cependant revenir un peu plus sur le dernier point de ma liste, celui qui concerne l’ignorance et la superstition. En effet, une de mes motivations dans ce travail est de combattre un certain nombre de fausses informations que l’on retrouve hélas bien trop souvent jusqu’à l’intérieur des loges maçonniques et que j’ai appelé plus loin des «quantox» [2].

Très rapidement: Nous entendons souvent dire que selon la physique quantique:

  • Tout serait vibration
  • Un électron pourrait être localisé à deux endroits différents en même temps
  • Tout serait décomposable en petites quantités minimales de chaque chose
  • Un chat pourrait être à la fois mort et vivant
  • Le fait d’agir sur une particule à un endroit pourrait modifier instantanément une autre particule à l’autre bout de l’Univers
  • La conscience de l’observateur modifierait le résultat de l’observation

Or tout ceci est parfaitement faux.

La physique quantique ne dit rien de tout ça. Chacune de ces phrases est en fait une tentative de faire saisir par des analogies trompeuses mais faciles à imaginer quelque chose qui ressemble un peu aux véritables découvertes de la quantique. Mais c’est bien là que surgit notre dilemme:

  • Ou bien on en reste là et on se contente d’une impression vague, parce que ça nous suffit. C’est tout à fait possible, il n’y a aucune honte à cela. Mais si on fait ce choix, il faut en assumer les conséquences et s’abstenir soigneusement d’essayer de tirer quelque déduction que ce soit d’impressions aussi floues, que ce soit en sciences, en philosophie ou en matière de spiritualité.
  • Ou bien, deuxième hypothèse, on veut aller plus loin. C’est tout à fait possible, pas besoin d’y passer des années d’études, mais il y a un minimum d’efforts à faire et une marche à franchir. En effet, rien de ce que dit vraiment la mécanique quantique n’est compréhensible sans un minimum de mathématiques. Il n’y a pas besoin d’énormément de mathématiques, mais d’un minimum [3]. En particulier, il est impossible de comprendre quoi que ce soit en mécanique quantique si on ne sait pas ajouter deux nombres complexes. Nous aurons l’occasion d’y revenir longuement bientôt.

Vous permettre de démêler par vous-même le vrai du faux la prochaine fois que quelqu’un parlera de la physique quantique dans votre loge, telle est l’ambition finalement toute simple de cet ouvrage.

Pourquoi les touristes et les amateurs

Mais bien évidemment, toutes ces questions n’intéressent pas tous les francs-maçons, et elles n’intéressent pas uniquement les francs-maçons.

C’est pourquoi cet ouvrage est aussi destiné à plein de gens qui leur ressemblent, au moins dans le rapport qu’ils ont aux sciences en général et à la mécanique quantique en particulier. Appelons-les des « amateurs de sciences » ou même, pour reprendre un terme qui est parfois employé par les spécialistes de manière péjorative [4] des « touristes ».

Du coup, si vous arrivez jusqu’ici et que vous n’êtes pas du tout franc-maçon, que vous n’avez pas envie de le devenir, ou même que vous détestez les francs-maçons pour une raison qui vous regarde, soyez les bienvenus. Il n’y aura rien dans la suite de tout ceci que vous ne pourriez pas suivre, aucune allusion maçonnique ou secrète, rien de ce genre.

Vous êtes bienvenu.


[1] J’écris le terme «franc-maçon» de manière neutre et « non genrée », que ce soit entendu une fois pour toutes.

[2] Je reprends ce terme de « quantox » parce qu’il me plait bien mais je n’en suis pas du tout l’auteur. Je donnerai le lien vers le document où j’ai trouvé ce terme dans un chapitre prochain.

[3] Ne me croyez pas, ne me croyez jamais sur parole, car je n’ai aucune réputation particulière qui pourrait vous y inciter. Sachez simplement que je le dis pour l’avoir expérimenté moi-même, mais aussi que Richard Feynman, Leonard Susskind et Sabine Hossenfelder, des experts renommés que nous croiserons souvent, l’ont dit et écrit: Les mathématiques de base qui permettent de comprendre les grandes lois de la mécanique quantique sont très abstraites mais pas très difficiles. C’est vrai bien sûr que les problèmes que doivent résoudre les chercheurs et les ingénieurs peuvent être parfois horriblement compliqués, mais dans les cas les plus simples, tout peut être traité avec des idées mathématiques qu’on n’étudie pas au collège mais qui, dans leur principe, ne sont pas si difficiles que ça.

[4] Jugement péjoratif qui ne les grandit pas, bien au contraire. Car que sommes-nous tous, tant que nous sommes, sur cette Terre, sinon de simples touristes?

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